Et si nos jugements implicites nous empêchaient de co-créer ?

Collectif Ariane
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🌿 Motivation au travail
11 juillet 2025
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Coopérer.

À première vue, un mot simple, presque évident. Pourtant, dans les faits, la coopération sincère et féconde se heurte à un obstacle majeur, souvent invisible : nos jugements implicites. Ces filtres inconscients, hérités de notre histoire individuelle et collective, nous amènent à juger l’autre avant même d’entrer en relation.

Cette tendance à juger est profondément ancrée dans notre fonctionnement humain. Notre cerveau est une formidable machine à catégoriser : pour survivre, il a dû rapidement décider qui était un allié et qui représentait une menace. Mais aujourd’hui, ces réflexes archaïques se transforment en freins à la collaboration, à la co-création et à l’ouverture.

Quand la différence bloque le lien

Pour illustrer cette idée, l’émission « Sommes-nous tous racistes ? », diffusée récemment sur France 2, propose une expérience aussi simple que percutante.

Dans cette expérience, un participant observe une main posée devant lui. Trois types de mains sont utilisées :

– une main qui ressemble à la sienne (même couleur de peau),

– une main d’une couleur opposée,

– et une main violette, artificielle et non humaine.

Une aiguille est ensuite enfoncée dans la main visible, et les chercheurs mesurent en parallèle les réactions corporelles (réflexes, micro-contractions) et l’activité cérébrale.

Les résultats sont frappants :

– Lorsque la main est similaire à la sienne, le cerveau réagit fortement, comme s’il s’agissait de sa propre main.

– Lorsqu’elle est d’une couleur opposée, il n’y a pas de réaction. La main est « autre » et le cerveau ne déclenche pas de mécanismes empathiques.

– Plus étonnant encore, face à la main violette, pourtant non humaine, le cerveau réagit de nouveau.

Cette expérience met en lumière un phénomène fondamental : pour ressentir un lien, nous avons besoin de lever nos filtres implicites, nos préjugés, qui nous coupent de l’autre. Notre cerveau réagit à une main violette sur laquelle il n’a aucun a priori mais ne réagit pas à une main de couleur opposée à la sienne, catégorisée comme différente.

* Expérience menée par Angela Sirigu : chercheuse en neurosciences cognitives, directrice de recherche CNRS à l’Institut des Sciences Cognitives Marc Jeannerod et directrice scientifique du Centre d’excellence des troubles du neurodéveloppement à Lyon.

Juger ou coopérer : un choix intérieur

Coopérer véritablement suppose une intention claire : partager, ajuster, chercher ensemble une solution au service d’un objectif commun. Mais dès que nous « pré-jugeons » ou jugeons l’autre — consciemment ou inconsciemment — nous nous plaçons en retrait. Nous ne sommes plus dans l’exploration, mais dans la séparation, la défense de notre « cohérence » intérieure face à la différence.

Ces jugements peuvent porter sur des aspects très variés :
– l’apparence physique,
– la manière de penser ou de s’exprimer,
– le statut social,
– les différences culturelles ou professionnelles,
– ou encore les différences de personnalités, souvent mal comprises ou interprétées.

Sur ce dernier point, le profil J’AIME illustre bien combien nos différences de modes de fonctionnement peuvent devenir source de jugements. Plutôt que de valoriser la complémentarité entre Analyse, Échange, Imagination et Méthode, nous nous nous opposons au lieu de jouer la complémentarité.

La force du questionnement plutôt que la cohérence immédiate

Face à la différence, plutôt que de chercher à juger ou à « convertir » l’autre à notre logique, que se passerait-il si nous choisissions de questionner ?

– Pourquoi cette personne voit-elle les choses ainsi ?

– Quelles expériences façonnent sa vision ?

– Qu’ai-je à apprendre de cette perspective ?

Ce déplacement du « je juge » vers le « je questionne » est l’une des clés de la coopération durable. C’est aussi un geste profondément humain : accepter de ne pas tout comprendre immédiatement pour créer un lien plus fort et plus riche.

Et maintenant ?

L’expérience de France Télévisions nous révèle, par le corps et le cerveau, que nos biais agissent avant même notre volonté consciente. Mais elle nous rappelle aussi qu’en travaillant sur notre vigilance et notre ouverture, nous pouvons aller au-delà de ces réflexes.

Pour coopérer, innover, co-construire — que ce soit dans une équipe, une organisation ou une société — il nous faut cultiver cette capacité à dépasser nos jugements implicites. Non pas en les niant, mais en les observant, en les questionnant et en choisissant, chaque jour, d’ouvrir la porte à l’autre.

Et si la prochaine fois que nous sentons un écart, une différence ou une incompréhension, nous choisissions de poser une question plutôt que de poser un jugement ? C’est peut-être là, dans ce simple geste intérieur, que se joue la vraie capacité à coopérer.


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Marc VILCOT
Com-Hom

Marc Vilcot : J’ai vécu 17 années enrichissantes de vente et management dans l’industrie. De formation technique (Grenoble INP 89), mes préférences créatives et relationnelles m’ont vite orienté vers des activités commerciales et marketing : directeur commercial (1997-2007). En 2008, je me suis investi dans la formation et l’accompagnement, poursuivant ainsi, dans des contextes variés, le développement de la performance par « le travailler ensemble ».

Je trouve en Com-Hom : confrontation de nos approches, évolution permanente de nos pratiques, laboratoire d’idées, confiance.

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